• 31 août 2017      

    Mémoires d'un Diagonaliste

    Brest – Perpignan

    Perpignan – Strasbourg

    Strasbourg -Brest

     

     

    Avant-propos

    Vous allez peut être vous lancer dans la lecture de ces quelques pages qui relatent mon périple avec Dominique Bourgeteau, sur des routes de France, à l'occasion de mes premières Diagonales du 16 au 29 juin 2013.

     

    Mais sachez que nul n'est tenu de tout lire, si cela vous prend la tête au bout de quelques lignes ne vous obligez pas à me dire :  « j'ai bien aimé ».


     

    Une Diagonale c'est quoi ?

     

    Les Diagonales de France, au nombre de 9, consistent à relier à bicyclette ou toute machine mue par la seule force musculaire, deux sommets non consécutifs de l'hexagone français, en des délais inférieurs ou au plus égaux à ceux indiqués dans le tableau ci-dessous. Chaque Diagonale constitue une randonnée indépendante pouvant être effectuée dans l'un ou l'autre sens. Le choix de l'itinéraire est libre mais il ne sera pas tenu compte de la distance prévue par le candidat pour justifier une modification des délais accordés.

     

    Diagonales de France Distances Délai
    Brest - Menton 1400 km 116 h
    Dunkerque – Perpignan 1190 km 100 h
    Hendaye - Strasbourg 1170 km   99 h
    Brest - Perpignan 1060 km 89 h
    Perpignan - Strasbourg 940 km 78 h
    Strasbourg - Brest 1050 km 88 h
    Dunkerque – Menton 1190 km 100 h
    Dunkerque – Hendaye 
    1050 km 88 h
    Hendaye - Menton 
    940 km 78 h

     

    Le dimanche 16 juin 2013 à 5 heures je quitte libre le commissariat central de Brest, libre d'enfourcher ma randonneuse, libre de tenter de rallier Perpignan distant de 1055 km, sans assistance et en moins de 89 heures, libre de tenter ma première Diagonale.

    Depuis longtemps je voulais faire des randonnées longues distances, les récits de voyages de Nicole et Jean Claude Chabirand, Grands Randonneurs du RC Anjou, ne suffisaient pas à me décider.

    Le déclic se produisit en février lors de l'Assemblée Générale de l'UAF (Union des Audax Français) à Paris, lorsque Dominique Bourgeteau du Vélo Loisir Saônois (Mamers 72), m'invita à l'accompagner sur son projet de diagonales pour 2013 .

    A l'énoncé de son programme je crois me souvenir lui avoir répondu « fada », jugez vous même Brest - Perpignan suivi de Perpignan - Strasbourg et pour clore le triangle, Strasbourg - Brest ; trois Diagonales à suivre !, 3000 km en 14 jours !...

     

    Je réservais ma réponse et lui demandais deux mois de réflexion, ce qui me laissait le temps d'engranger des kilomètres de préparations avant la date d'inscription ; mais le soir même de cette réunion, la décision était prise pour la première Diagonale, la seconde je la classais possible et la troisième classée dans le tiroir des projets fort improbables.

     

    Acte I, Brest - Perpignan

    Quatre mois plus tard et avec environ 5000 km de préparation je retrouve Dominique, gare du Mans, vers midi en ce samedi 15 juin. Nous sortons de la gare de Brest vers 16 heures pour rejoindre notre hôtel, le Kélig, situé à deux pas de là. Formalités d'usages accomplies à la réception, vélos au garage (dans la chambre) nous partons faire un tour en ville.

    Nous déambulons vêtus de nos couleurs de club respectif dans le centre ville et comme tout touriste descendons voir la mer, non pas en espadrilles mais en nu pied cycliste Shimano; malgré le soleil la température est fraîche et nous nous forçons pour boire la première bière de notre long périple. Après le repérage du lieu de départ et une assiette de pâtes, dans un restaurant Brestois nous nous retrouvons dans notre chambre pour les derniers préparatifs: rangement des vêtements civils (1 Tee shirt, 1 bermuda et 1 slip) dans la sacoche arrière. Le reste de la garde robe est composé de deux cuissards, de deux maillots (un de trop) une paire de chaussettes, deux débardeurs, un coupe vent et l'indispensable gilet de sécurité.

    La sacoche avant est à la fois trousse à pharmacie : Biafine, Nok, Flector, Baume Chinois ( ils sont partout), crème solaire (complètement inutile pour cette quinzaine), trousse de toilette : brosse et dentifrice .Mais ce qui prend le plus de place dans cette besace, vous qui m'avez accompagnez sur des brevets, vous avez certainement deviné de quoi je veux parler ? la Boufff !...

    Le gâteau du Randonneur est du voyage accompagné de barres et de tubes énergétiques dans tous les espaces vides de la '' Berthoud '' .

    Il y a aussi le dépannage : 1 pneu, 2 chambres, dérive-chaines, etc … répartis principalement à l'arrière, sans oublier la communication: téléphone dans une poche, chargeur dans une autre et l'appareil photos je ne sais plus où, si bien que ma randonneuse avoisine les 18 kilos, vous ajoutez le pilote et le quintal est atteint, pratique pour les descentes !...

     

    5 heures, l'heure est venue de prendre la route vers Perpignan sous un ciel couvert, 5 heures 05 pluie sur la ville et sur nous, 5 heures 08 Dominique perd son phare avant, 5 heures 15 premiers encouragements de spectateurs particulièrement bruyants, devant une boite de nuit située en haut de la première bonne côte.

    Nous sommes maintenant en campagne, sur des routes familières aux participants des Paris Brest Paris, un court arrêt à Sizun, km 36, pour déposer la première carte postale preuve de notre départ, petit déjeuner à Carhaix dans un Hôtel Logis de France, vraiment super, à recommander. En six ou sept passages, que de bons souvenirs dans cette ville, c'était en quelle année ce restaurant pendant un 600 du RCA ou il y avait 5 pompes à bière en libre service? Il faudra que je demande à Bruno le Varadais.

    Pour la suite de la matinée mieux vaux ne pas avoir abuser de breuvages à fort degré, le GPS de Dominique nous entraîne sur des routes, je vous dis pas, ''Bibendum'' ne doit même pas connaître,

    gauche, droite, gauche, tas de fumier débordant sur la chaussée, droite etc.... pendant 10 km au minimum, ce n'est pas une erreur de trajet mais la route la plus courte en vélo pour rallier Guéméné, au km 125, pour notre premier repas et quel repas jugez plutôt.

    11heures 20 premier restaurant : « je ne sers qu'à partir de 12 heures ! », vous pouvez nous faire des pâtes? « Je n'ai pas de pâtes en cuisine » ; 11 heures 30 deuxième auberge, même pas le temps de demander ; moi qui pose délicatement mon cycle le long d'une jardinière, haute de 80 cm, faite dans la pierre locale et garnie de petits conifères ; donc je vous jure moins fragile que ma randonneuse, j’entends: « enlève ton vélo de là, je suis ouvert mais aujourd'hui je ne sers pas! »

    Bizarre, est-ce ma tentative de stationnement qui a déplu, notre tenue vestimentaire légèrement humide ou la célèbre formule d'un ancien Président qui traduite en Breton se décline par : travailler moins pour gagner moins ; nous ne le saurons jamais.

    Bien évidemment nous avons continué notre quête d'une bonne table et notre ténacité a été récompensée ; la perle, celle qui marque à jamais un voyage itinérant, elle se dissimule dans le centre ville au 7 de la rue Bisson de ce charmant village sous le nom de : Bar PMU l'Embuscade,

    1 heure d'arrêt, le temps de manger deux Croque Monsieur chacun, un yaourt et un café ; le tout dans une atmosphère des plus enfumées par les nombreux turfistes tenus debout par le bar, j'espère que le retour au domicile est prévu en sulky. Mémorable .

    Pour nous le départ de cette cité Bretonne se fait sans problèmes, quelquefois il y a de la surcharge alimentaire, mais là !

    L'arrêt suivant est programmé au km 195 à Elven que nous atteignons vers 16 heures, seul anicroche sur ce tronçon, des bénévoles d'une manifestation d'auto-cross veulent absolument nous faire prendre la déviation mise en place pour l'occasion ; petite explication sur notre chevauchée et nous passons au milieu des chevaux vapeurs.

    L'accueil à Elven est très différent du précédent, Dominique avait demandé l'hospitalité à des cousins : Karine et son ami. Je me souviens avoir trouvé curieux la programmation d'un dîner à cette heure de la journée mais finalement il est le bienvenu après le déjeuner gargantuesque de Guéméné. Quatre vingt dix minutes plus tard nous remontons sur nos vélos, après avoir mis la clé derrière la jardinière, nos hôtes, attendus et déjà en retard, sont partis avant nous.

    Les 70 km restant s'annoncent sans relief ce qui me fait penser que je ne vous ai pas précisé que nous nous sommes coltinés Roc Trévézel dans les Monts d'Arrée avant d'atteindre Carhais. Donc cette fin d’après midi n'est marquée que par l'insistance du GPS à vouloir nous faire prendre la voie rapide entre La Roche Bernard et Ponchateau. Au passage je signale à la DDE qu'un panneau directionnel dans le dernier rond point à la sortie de la Roche Bernard, pour indiquer la petite voie parallèle à cette nationale ne serait pas superflu.

    L'arrivée à Savenay au bout de 270 km agrémenté de 2176 m de dénivelé se fait pratiquement de nuit, nous avons un retard de 30 minutes. L’hôtel est fermé, mais pas de panique la clé de l'établissement est déposée chez le voisin. Dominique est sur le point de rentrer dans l’hôtel, manifestement il ne connaît pas mes besoins énergétiques . Pour lui le dîner avait été pris chez ses cousins vers 16 heures 30, mais pour moi ce n'était que le goûter, il fallait trouver d'urgence une table. Nous en trouvons une bien agréable à deux pas de la chambre. La première journée se termine par un coucher proche de minuit.

     

    Le réveil à Savenay n'est pas trop matinal, 5 h10 et le petit déjeuner se résumant à une thermos de café accompagné d'une petite viennoiserie sous vide, aimablement mis à disposition sur la table, par le patron, la veille ; le départ prévu à 5h30 est respecté. La journée s’annonce longue avec plus de 300 km programmés et elle le fut. Heureusement le relief n'est pas celui de la première journée, Openrunner ne nous promet que 1580 m de dénivelé et nous ne sommes pas à plaindre puisque au bout de 25 km une croisière nous est offerte par notre Tour Opérator pour franchir La Loire avec le bac au Pélerin. Pas le temps d'aller saluer Jean Luc à Rezé, de toutes manières il doit encore dormir, fatigué de ses 470 kms des deux jours précédents, effectués entre Vihiers -La Presqu'ile de Rhuys et retour. Je vous recommande cette belle organisation des Cyclos du Lys de Vihiers dans le Maine et Loire.

    Notre premier pointage à Les Brouzils (9h15) est couplé avec le petit déjeuner ; le Café des Sports ne vendant que du liquide donc un saut à la boulangerie voisine s'avére indispensable pour compléter le menu. Cette gymnastique se répétera à plusieurs reprises ; pas simple de prendre un vrai petit déjeuner dans notre beau pays.

    A partir de cet endroit une difficulté fait son apparition, le vent défavorable qui nous accompagnera une bonne partie de la journée et ralentira notre progression l'après midi. Pause déjeuner à Luçon puis direction Marans pour le second pointage de la journée chez un Carrossier. Ce choix ne s'avère pas le plus judicieux ; dans un premier temps l'artisan refuse d'apposer son cachet sur nos feuilles de routes, mais Dominique se montre persuasif et patient. Oblitération faite nous repartons dans le vent vers les Charentes ; Surgères, Tonnay Boutonne sont successivement traversés puis Cognac pour le 6ème contrôle, mais avec 15 minutes de retard sur l'horaire. La pendule de la cathédrale marque 20h et le dîner n’est prévu qu'à l'arrivée de l'étape, donc encore 40 kilomètres à effectuer ; il y a matière à déclencher une grève (dans la bonne humeur).

     

    POUR LE DROIT A L'ALIMENTATION A DES HEURES DECENTES .

     

    J'avise un restaurant et m’installe en terrasse avec une grande et bonne assiette de produits régionaux ( des petits magrets, des toasts avec du foie gras etc...) un régal ce menu « sportif », tout cela devant les yeux de Dominique qui ne veut rien prendre si ce n'est un Monaco.

    Quarante cinq minutes plus tard (retard d1 heure) départ pour le final du jour sous un ciel de plus en plus menaçant, la belle côte d'Archiac montée ne reste plus qu'à trouver Touvérac dans cette jolie campagne à la nuit plus que tombante, ce qui ne pose pas de problèmes ; mais voilà, Sylvie et Philippe n'habitent pas le village et la mémoire du GPS n'avait pas été renseignée sur le lieu dit. Dominique ne connaît pas l'adresse, son téléphone n'a plus de batterie donc plus de répertoire, que faire ? Je téléphone à Nelly, la femme de Dominique, sœur de Sylvie , vous suivez ?

    Nelly, qui dans un premier temps ne me reconnaît pas, ne retrouve pas le numéro de téléphone de sa sœur, me rappelle au bout de 5 minutes et enfin renseigné le portable sonne chez Philippe. Ouf ! Avec l'adresse et les explications pour arriver chez eux, nous repartons sous la pluie pour nous retrouver une seconde fois devant la Mairie de Touvérac! il y a comme un problème, voir deux, nous n'avons pas trouvé le gîte et ce n'est plus de la pluie mais un orage très violent. Donc nouvel appel chez Philippe qui cette fois vient à notre rencontre, ils ne nous reste plus qu'à suivre les feux de sa voiture pour arriver à destination. Comme le pré lavage est bien avancé nous passons de suite sous la douche et terminons la journée par une bonne soupe et des pâtes tout en narrant les péripéties de la journée. Ce couple est charmant, mais il est déjà demain, nous les remercions de l’accueil et leur souhaitons une bonne nuit.

     

    Pour cette troisième journée le programme prévoit 305 km avec 2300 m de dénivelé, donc lever à 5h, pour le petit déjeuner nous faisons comme chez nous, nous nous servons sans réveiller Sylvie et Philippe et à 5 heures 45 départ, sous la pluie et avec un GPS qui nous demande au bout de quelques kilomètres d'emprunter la Nationale 10. Demi tour, nouveau demi tour, passez sous la 10 une fois puis deux et de guerre lasse finissons par emprunter cet axe sur 4 ou 5 km ( au lever du jour et sous la pluie avec des gros camions qui doublent en klaxonnant ) pas fiers les cyclos, le temps défile, tout comme les kilomètres mais c'était des bornes supplémentaires, pas moins de 30 avant de retrouver la bonne route, toujours sous une pluie fine, 2 heures de retard lorsque le contrôle de Montpon Ménétérol se présente.

    La restauratrice de Saint Avit se souviendra certainement de notre passage, nous lui avons détrempé le carrelage de sa salle, tant nous étions dégoulinants et moi je conserverai de cet établissement le souvenir d'un très bon déjeuner.

    Bien sûr les horaires de passage sont chamboulés, le retard compromettant l'arrivée à l’hôtel, il nous faut trouver un autre hébergement. Je lance un SOS à ma grande fille, Alice et lui demande de voir les possibilités du côté de Grenade, je refuse sa première trouvaille, trop chère et accepte la seconde, une sorte de village vacances beaucoup plus abordable financièrement et avec code d'accès pour l'ouverture des portes.

    Le dodo étant solutionné, restait à l'atteindre.

    Alors que nous approchons de Casseneuil dans le Lot et Garonne mon pneu arrière met un terme à sa carrière, durée de vie 1500 km, le bougre ; changement de chambre et pose du pneu de secours pour rejoindre, encore sous la pluie,Villeneuve sur Lot et trouver un vélociste qui me dépanne de suite. Le contrôle s'opère chez cet artisan à 17 heures (retard 3 heures).

    L'après midi s'avance, mais il est beaucoup trop tôt pour penser au dîner ; nous quittons donc la vallée du Lot, vers Penne-d'Agenais. En même temps que les routes rugueuses s'élèvent, la température baisse, l'orage commence à gronder, la pluie est de retour, l'alarme estomacale se déclenche, niveau mini et les rares villages sont sans commerce ;cque du bonheur.

    20 h30, nous roulons en direction de Bourg de Visa, sur la droite, une belle enseigne : Restaurant à 500 m, grande joie dans le mini-peloton, sprint pour la pancarte et déception à l'arrivée : Restaurant fermé définitivement, lot de consolation tous les mardis camion Pizza face à la Mairie. Ce n'est pas tous les jours fête sur une Diagonale !... ; banc de pierre, devant un bar fermé, cartons et pizzas sur les genoux, sans fourchettes ni couteaux deux cyclistes tentent vainement de se réchauffer et de reprendre des forces pour affronter les 75 kilomètres restants.

    Le contrôle de Castelsarazin est atteint à 22h30, (prévu 17 h 15), un tampon dans une pizzeria qui ferme et poursuite de la route sous un ciel maintenant bien étoilé. Interrogation sur la route à suivre, arrêt en pleine campagne devant une maison esseulée; les occupants pas surpris, nous ouvrent. Ils avaient repéré nos lampes frontales qui cherchaient vainement un panneau indicateur pour se remettre sur la bonne voie. Comme quoi tout le monde n'est pas armé à 23 heures ; remis sur la bonne direction, trouver la chambre à Grenade fut simple et le sommeil aussi. Pensez donc à 1 heure !...

     

    Pour cette dernière journée le départ est avancé à 5 h 30, il nous faut terminer l'étape de la veille soit 30 km à ajouter aux 170 qui nous conduisent à Perpignan terme de notre Diagonale.

    La mise en route est relativement facile, aidés par les messages d'encouragement de la famille et de quelques amis cyclos au courant de notre projet. Le trafic routier bien que dense, sans doute des ouvriers qui se rendent sur le site d'Airbus que nous apercevons à notre droite, ne nous gêne pas et bientôt nous rentrons dans la ville natale de Claude Nougaro. Nous longeons sur quelques centaines de mètres la Garonne et pénétrons dans le cœur de la Ville Rose par ses petites rues (merci Mr GPS), nous nous arrêtons quelques instants, le temps d'un pointage, mais la visite de cette belle ville n'est pas au programme du jour. Après Toulouse, Labastide Beauvoir lieu où initialement notre nuit était prévue, le patron descend nous ouvrir et nous sert un copieux petit déjeuner. Des petites routes, pas très entretenues nous conduisent à Castelnaudary, mais ce n'est pas l'heure de goûter à sa spécialité, dommage !... Par contre jour de chance, au hasard d'un renseignement routier demandé à deux agents de la voirie, ceux ci nous conseillent d'emprunter la route D 6113 plutôt que la D33 qui est étroite et à fort trafic. Cette Nationale, enfin ex puisqu'il me semble qu'elle sont toutes déclassées en départementales, se révéle être un billard et pour la première fois depuis Brest nous roulons à plus de 35 km/h sur le plat pendant de nombreux kilomètres, faut dire aussi que le Canal du Midi est notre voisin, donc relief inexistant. Il y a un gars qui tire la langue à vouloir me suivre !...

    Toutes les bonnes choses ont une fin et l'arrivée à Carcassonne ramène une allure plus en rapport avec notre loisir favori, ici encore le hasard fait bien les choses : un cycliste nous conduit dans le centre ville où il connaît une très bonne table, mais les tarifs nous incitent à poursuivre notre recherche, à quelques pas de là une terrasse plus abordable financièrement nous accueille. Quatre vingt dix minutes plus tard nous quittons la ville après avoir franchi l'Aude et admiré au loin ses remparts classés au patrimoine mondial de l'UNESCO. Avec le soleil revenu, pour cette dernière journée, au fur et à mesure de notre cheminement nous ressentons plus le changement dans l'habitat que les jours précédents. Chose frappante également, depuis la région Nantaise je ne pense pas avoir parcouru cinquante kilomètres sans voir vu un vignoble ; surprenant ! ...

    Nous pénétrons maintenant dans le massif des Corbières, célèbre pour ses vins mais aussi pour son miel de Romarin, le relief est plus vallonné mais la perspective d'en terminer nous encourage à pédaler et que dire de ses paysages magnifiques même pas enlaidi par les nombreuses éoliennes.

    A 40 km du but nous rentrons dans une autre merveille, le petit village de Fraissé des Corbières ; particularité pour ses 250 habitants, pas de rue horizontale et bien sûr la boite à lettres que nous cherchons pour déposer la carte de fin de Diagonale se situe au point bas, quant à la sortie du bourg vous l'avez deviné elle se situe au point haut. Pas grave plus que 38 km et un ou deux petits cols. Dans le match des crevaisons Dominique égalise dans la dernière ascension, le col du Feuilla. Descente vers la plaine, traversée de Rivesaltes avec en point de mire l'aéroport de Perpignan et juste derrière celui-ci, la plaque d'entrée de ville où nous nous arrêtons pour immortaliser notre arrivée par une photo.

    Il ne reste plus qu'à trouver le commissariat de police pour obtenir le précieux sceau Républicain officialisant notre arrivée dans le temps imparti, à 19 heures 35.

     

    J'ai réalisé ma première Diagonale.

     

    Fier de moi ; j'ai le droit !... je glisse mon carnet dans ma poche et direction l’hôtel Méditerranée, Dominique connaissant les lieux pour y avoir séjourné en 2012, au terme de Dunkerque Perpignan, le GPS devient inutile.

    Dominique retrouve le Patron de l'établissement, et installés en terrasse nous fêtons rapidement et avec modération notre Diagonale. Ensuite déchargement des bagages, vélos au garage dans un bureau et pour nous deuxième étage par un ascenseur plutôt poussif. J'ai oublié de préciser que le standing du lieu ne correspond pas à ce que l'on pouvait espérer à l'évocation du nom ; vous vous imaginez sans doute un très luxueux hôtel de bord de mer avec palmiers et plage privée.

    Notre « suite » pourvue d'un balcon et de deux fenêtres (simple vitrage), est petite mais suffisante pour notre séjour et dotée d'une salle d'eau « Barbie » (très petite) aux rideaux plastiques douteux; la tête d'un palmier, tout de même, nous coupe la vue de l'immeuble d'en face.

    Après quelques appels téléphoniques pour recevoir des félicitations et une bonne douche nous nous retrouvons sur l'avenue du Général de Gaulle,en direction de la gare, en tenues « touristes chaussés Shimano », Dominique achète le journal l’Équipe. Nous ressortons, sans prendre le temps de consulter les horaires pour Angers St Laud et nous nous dirigeons vers la terrasse d'un restaurant testé par mon acolyte l'année précédente, patron sympathique, repas correct, agrémenté par les allées et venues des Perpignannaises en tenues estivales. La soirée ne s'est pas prolongée et le sommeil vite trouvé.

    Les employés du service propreté de la ville de Perpignan sont du genre lève tôt, premier réveil vers 4h30 avec la petite balayeuse laveuse, celle qui slalom sur les trottoirs et qui envoie les déchets vers le centre de l'Avenue, 30 minutes plus tard, sa sœur aînée, plus grosse et plus sonore termine le travail. Ouf !... c'est terminé, je peux finir ma nuit. Hélas ! le jeudi à 6H30 sur l'avenue du Général de Gaulle c'est aussi le jour de la collecte des ordures ménagères ; mais ce n'est pas comme chez nous avec nos petits bacs plastiques à roulettes, les ordures sont dans des containers enterrés. Le camion approche, le moteur tourne à plein régime pour manœuvrer la grue, des bruits de portes métalliques qui s'ouvrent, le caisson s'élève au-dessus de la benne et comme rien ne doit rester dans le bac on secoue et ressecoue en frappant sur les rebords du véhicule. Remise en place de l'objet dans son antre, un juron pour un motif inconnu, fermeture des portes et le camion s'éloigne, pas assez loin pour que l'on n'entende pas la nouvelle manutention. Bon OK je ne me suis pas levé pour voir, mais je suis certain du scénario, l'isolation phonique ne ment pas.

    Nous émergeons vers 8 heures, la journée s'annonce belle; concertation pour établir le programme de la journée de repos et nous partons en quête du petit déjeuner ; puis au retour, lessive et séchoir solaire sur la rambarde du balcon pour nos cuissards et maillots ; la matinée se passe, un rien nous occupe, déjeuner au même endroit que la veille et j'annonce de suite le dîner dans le même lieu. Grande sieste, suivi des premiers préparatifs pour le prochain défi; la seconde Diagonale est évidente, pour rentrer il est plus simple de rejoindre Strasbourg en vélo que Angers en train, pas moins de trois changements et des attentes interminables en gare.

    Avant de nous coucher nous demandons au patron du Méditerranée s'il est possible d'avoir du café dans un thermos pour le lendemain, il accepte mais sans entrain ; un dernier coup d’œil aux vélos et au lit à 21 heures.

    Si vous allez à Perpignan n'encombrez pas votre valise d'un réveil, la municipalité pense à vous cette fois il est 5 heures pour la première balayeuse et le rappel effectué 10 minutes plus tard par sa frangine, au cas où vous seriez reparti dans vos rêves les plus fous .

    Première surprise de la journée, ça sent bon le café, il y a aussi du pain et des viennoiseries encore chauds sur la table; merci patron merci patron pour votre accueil.

     

    Acte II, Perpignan - Strasbourg

    Plus détendu qu'au départ de Brest en ce vendredi 21 juin ; toujours accompagné de Dominique, je me retrouve au commissariat avec un nouveau carnet de route à oblitérer et à 6 heures 35, en selle. La sortie de la ville se passe bien, du moins au début puisque nous reprenons en sens inverse les rues que nous avons empruntées depuis Rivesaltes pour le final de notre première Diagonale ; ensuite une zone commerciale en plein réveil, où nous n'avons rien à faire, nous attire, le temps de comprendre que la seule solution pour sortir de ce dédale commercial est de prendre la grande route D900. Sur ce bon revêtement, sous un soleil prometteur et sans douleurs particulières, notre rythme régulier de pédalage est revenu rapidement.

    Je glisse la carte postale de départ dans la boite à lettre de Salses le Château, mais nous ne nous attardons pas ; au menu du jour il y a : quatre départements à emprunter, 260 kilomètres à effectuer, agrémentés de la traversée de la ville de Montpellier; bonne nouvelle la feuille de route n'annonce que 1200 m de dénivelé. Nous remontons vers l'Aude, entre l'autoroute La catalane et de nombreux étangs qui bordent la mer Méditerranée toute proche. La deuxième surprise arrive peu de temps après avoir quitter les Pyrénées Orientales, à la sortie de Port la Nouvelle ; faisant totalement confiance à l'informatique embarquée nous prenons l'ancien chemin de halage du canal de la Robine. Ce cheminement est peut être agréable à effectuer en VTC ou VTT mais beaucoup moins sur des randonneuses lestées ; rechercher en permanence la trajectoire qui nous permet d'éviter le maximum de trous et les cailloux les plus conséquents, à une vitesse qui oscille entre 10 ou 12 km/h est quelque peu stressant. Quel soulagement à la sortie de se secteur d'une dizaine de kilomètres, sans crevaisons, certains crieraient logiquement au miracle d'autant que sur cette même portion, troisième et dernière surprise de la journée, la bénédiction divine tombe du ciel sur nous pauvres pêcheurs que nous sommes, mais une bénédiction phytosanitaire. En effet un hélicoptère, qui survole à basse altitude la rizière parallèle à notre chemin, ouvre ses vannes, répandant de fines gouttelettes d'un produit qui nous restera inconnu, sans doute « bio » puisque aucune pathologie ne se déclenche sur les deux gros moustiques. Après être passé sous l’autoroute la Languedocienne et avoir aperçu la ville de Narbonne à notre gauche nous retrouvons des vignobles et des petites routes très chaotiques, résultat crevaison arrière pour moi, 2 à 1 dans le match des pneumatiques; malgré cet imprévu nous atteignons Sérignan, dans l'Hérault pour le déjeuner et le premier pointage de cette étape en respectant l'horaire fixé, ce qui me permet de rappeler une règle valable pour toutes les grandes distances : au restaurant se présenter si possible en début de service pour perdre le moins de temps.

    Un bonheur ce déjeuner au Mistral, installés à une table en terrasse, à l'ombre des platanes, nous savourons notre Panaché et l'excellent repas, en contemplant les camelots nombreux et variés, présents devant nous sur la place du marché de Sérignan.

    Je ne sais pas si nous avons convaincu les deux électriciens en bâtiment de la table voisine, ils paraissent douter sérieusement de notre passé et de notre futur, malgré les plaques de cadres et les sacoches posées sur nos vélos ; malgré leur scepticisme c'est avec des encouragements polis de leur part que nous les laissons à leur desserts; je profite de l'étal du marchand de primeurs le plus proche pour m'approvisionner en fruits ( pêches, brugnons, abricots et bananes), plus trois cerises que la charmante vendeuse ne refuse pas de me donner.

    Nous reprenons notre route en croisant ici ou la des panneaux directionnels aux noms évocateurs : Béziers, et son rugby, Sète et son chanteur Brassens, le Cap d'Agde et sa baie des cochons ; ne nous égarons pas, restons concentrés ! ....

    Nous pointons 15 minutes en avance à Montpellier et les dépensons à musarder entre terrasses et marchands de fruits sur la place Roger Salengro, je trouve la population très cosmopolite et aussi joyeuse, en repartant j'ai l'explication de cette bonne humeur : la fête de la musique se met en place dans Montpellier et notamment place de la Comédie que nous traversons ; il faut être très vigilants parmi tous ces piétons et ces groupes de musiciens.

    Il est plus de 17 heures lorsque nous quittons les faubourgs de Montpellier, dilemme serons nous à l'heure à Connaux où l'hôtel restaurant retenu termine le service à 21 heures ? il reste à parcourir environ 85 km, plus un arrêt pointage. Nous jouons la prudence en prenant un léger repas en chemin ( j'ai oublié le nom du village). Même si la nuit est encore loin, pour éviter un nouvel arrêt, nous enfilons les gilets jaunes en quittant le restaurant ; le vent toujours bienveillant, la route facile, des villages hauts perchés se profilent, mais les routes, complaisantes, les contournent. Par contre, ils faut bien entrer dans Uzès si nous voulons obtenir le précieux sésame et çà grimpe!..., de plus nous devons zigzaguer entre des barrières d'interdictions de passage placées en travers les rues. Ce soir les voitures laissent le bitume aux orchestres et aux piétons qui profitent ainsi sereinement du centre ville et de son patrimoine classé : ville d'art et d'histoire. Bien évidemment la preuve de notre passage nous emmène vers un bar avec terrasse ; c'est quand même les vacances pour nous aussi ! Une fois de plus nos plaques de cadres intriguent, le couple et ses trois enfants installés à la table voisine nous questionnent, ils sont admiratifs et je pense sincères (même pas mal aux chevilles). Nous repartons heureux pour les 20 derniers kilomètres du jour et arrivons vers 22 H 30 à l’hôtel restaurant le Bernon. Il ne reste plus qu'une serveuse qui se hâte de desservir les tables, sans doute souhaite-elle se rendre sur la place du village d'où s'échappe des flons flons. L'assiette garnie, laissée à notre intention par le chef ne nous retient pas longtemps et montons nous coucher tout aussi rapidement.

    Fan de Dutronc, il est encore 5 heures quand nous nous remettons en selle, les prévisions optimistes des services météorologiques se vérifient avec ce léger vent portant qui se lève, si bien que nous atteignons dans les temps la commune de Le Theil située en Ardèche. Au menu ce matin il y a: omelette, jambon, yaourt et café, de quoi affronter les futures difficultés en toute sérénité, mais comme nous longons le Rhône les changements de braquets se font rares. A notre gauche il y a matière à faire du dénivelé, mais ce n'est pas le jour de l'Ardéchoise ; nous nous satisfaisons d'admirer les nombreux châteaux en ruines installés sur d'improbables promontoires qui semblent à la limite de l'équilibre. Toujours à notre gauche, le groupe industriel Lafarge semble bien présent dans ce secteur avec de nombreuses carrières et cimenteries ; pour certaines d’entre elles nous avons l'impression de passer à l'intérieur de l'usine. Nous en sommes aussi à notre deuxième centrale nucléaire ; le site de Cruas succède aux réacteurs du Tricastin et si vous ajoutez un fleuve aux rives canalisées vous comprenez que cela ne fait pas rêver le Ligérien que je suis.

    Valence dans la Drôme nous offre l’échappatoire de cette triste vallée et me permet de faire la connaissance d'une nouvelle branche de la famille de Dominique, avec en prime un nouveau repas décalé, en effet il n'est que 10 h 30. Le cousin Yves nous attend avec : crudités, escalopes de dinde, pâtes, fruits, yaourt, café non arrosé et le tout sans addition ; le service rapide nous autorise 10 minutes de sieste, sur un lit pour le collègue et sous un arbre pour moi. Remerciements au Cousin, le bonjour à la Cousine qui travaille, des bises aux deux Petits Cousins et bidons remplis au maximum nous attaquons l'après midi par l'escalade de l'avenue Jacques Brel à Bourg les Valence.

    Les résultats des deux soustractions suivantes reflètent ce qui nous attend : 258 – 114 = 144, voilà pour le kilométrage restant et 1730 – 200 (approximativement) = 1530 m pour le dénivelé sachant que le soleil est aussi du voyage, à quelle heure arriveront les deux cyclos ?

    Un petit aparté pour vous dire que Romans sur Isère n'est pas très loin et que si vous voulez pédaler dans la Drôme provençale (20 km des premiers cols du Vercors) je vous recommande le Gîte des Balmes ; avec Ginette nous y avions passé une semaine et c'est vraiment très bien ; capacité trente personnes, gestion libre ou pension complète, piscine etc...

    Lapeyrouse Mornay est la dernière cité Drômoise que nous traversons et Monsieur Bouzigue le patron du bar épicerie, sans fruits, tamponne les carnets à 15 h. Les routes de l'Isère ne sont qu'une successions de collines, de virages, d'intersections, encore et encore. Le retour dans la vallée du Rhône met un terme à ce labyrinthe routier et nous permet également d'apercevoir la troisième centrale nucléaire du jour : le Bugey ; je vais peut être acquérir un vélo à assistance électrique !

    Le temps de réparer la roue arrière du Mamersois à 15 kilomètres du but qui ainsi égalise et nous pointons au Relais du Bugey à 20 h45 (1h 15 de retard.). Un Monaco plus tard et les plaintes du Restaurateur entendues; il n'avait pas un seul client à choyer dans sa salle, nous repartons pour les derniers hectomètres du jour.

    Ce n'est plus des Diagonales mais un arbre généalogique ou le jeu des 7 Familles que m'a concocté Dominique ; cette fois je demande Josette la Belle Sœur, je ne connaîtrai pas le Beau Frère Patrice, il faisait un stage photo ; mais les trois enfants et les rapportés respectifs sont présents ; repas et soirée agréable avec en prime machine à laver et sèche linge pour les cuissards et maillots. Dodo minuit.

     

    La nuit dans l'Ain ressemble aux précédentes : courte, Josette s'ést levée pour notre petit déjeuner, agréable attention; premier coup de pédale à 5 heures, combien en ferons nous pour accomplir les 290 km prévus dans l'Ain, le Jura, le Doubs, le Territoire de Belfort et le Haut Rhin ?

    A l’énoncé des départements on pense peut être moyenne montagne, mais la feuille de route est rassurante puisqu'elle n'indique que 2400 m de dénivelé. L'échauffement se fait en remontant la rivière l'Ain sur 20 kilomètres, ensuite changement de physionomie, en passant sous l'autoroute des Titans et longue montée vers le plateau du Revermont, peu de cultures mais de l'élevage, sans doute

     

    pour la fabrication du Comté. Depuis le kilomètre 50 nous pédalons dans le Jura et bizarrement la vitesse se réduit ; pas pour admirer les quelques petits villages encore endormis que nous traversons mais nos dérailleurs travaillent beaucoup plus. Cressiat est d'ailleurs annoncé à une altitude de 600 mètres; ce que nous remarquons également c'est le très petit nombre de village et donc de commerce, nous ne percevons pas la bonne odeur qui s'échappe des boulangeries et qui invite le cyclo à mettre pied à terre.

    Il faut attendre Lons-le-Saunier pour le petit déjeuner avec café et croissant, celui qui me laisse avec la faim ; il y a bien la solution d'ajouter une des spécialités locales, la petite boite ronde suspendue aux oreilles d'une belle tête de vache, mais elle ne me tente pas ce matin.

    Avant de repartir et comme nous commençons à avoir de l’expérience, nous nous dirigeons vers la supérette Spar ; si nous ne trouvons pas de restaurant ce midi, nous sortirons du sac. Ce matin là, la frénésie d'acheter nous a pris : pêches, abricots, bananes, yaourts à boire, salades composées. A chacun ses achats, le client précédent est sorti du magasin avec un litre de rouge, pas de problèmes de stockage pour lui, mais nous ! … C'est bien beau d'acheter, mais nos placards « Berthoud » affichent complets et il y a encore des vivres dehors ; que faire, sinon manger de suite le surplus.

    La route s’élève, redescend, tournicote et ça commence à chauffer ; plus tard nous croisons des voitures avec des vélos arrimés sur les toits, il y a des flèches fraîches sur la chaussée, mais pas de plantons aux intersections, pas de spectateurs et donc pas d'applaudissements pour nous ; trop d'avance cette fois, sniff...

    Mon compère travaillant chez l’Écureuil, nous décidons de conserver nos réserves de victuailles pour le goûter et la Truite de Quingey nous ouvre sa porte pour le déjeuner. Pas trop prudent sur ce coup là;  un Logis de France, un dimanche ; à table des gens biens et d'un certain âge, çà sent le gastronomique.

    La Kronembourg 3 €, l’entrecôte (excellente) 16,50 €, le café 2 €, vu le tarif pas de desserts. A j'oubliais l'entrée, un Beaufortais quand il voit sur un menu : salade, il imagine des crudités variées, comme au Relais de Brion ; à Quingey une salade c'est une salade : des feuilles de laitue avec quelques grains de maïs pour 6 €. En rentrant à la maison, mon premier travail sera de planter de la laitue.

    Le plein des bidons effectué, pour affronter cette chaude après midi dans le Doubs et nous repartons, Besançon est contourné par la droite ; je trouve les monts plus arrondis que dans le Jura, le vent toujours favorable ; la collation tirée de nos poches se fait sur une pelouse devant un restaurant fermé pour cause de repas de famille mais la Patronne nous ouvrira gentiment sa porte pour nous vendre un café. Nous pointons à 20 heures à la gare de Montbéliard, à proximité, les derniers camelots remballent les invendus de la brocante, plus loin, dans l'enceinte de l'usine Peugeot, le Stade Auguste Bonal, est calme, pas de rencontre ce soir.

    C'est ensuite le territoire de Belfort qui nous accueille sur environ 25 kilomètres; depuis la création des départements Parisiens celui-ci a perdu son titre de plus petit département de France. Pour en finir de cette journée, somme toute pas trop difficile, 5 kilomètres dans le Haut Rhin suffisent à nous conduire à la nuit tombante dans la rue du bourg de Bretten ; j’exagère, il y en a quatre: rue Principale, rue Neuve, rue du Champ de Mars, rue d'Eteimbes et pour compléter votre savoir 180 habitants sur 4,16 km². Source Wikipédia.

    Vous vous posez certainement la question, pourquoi avoir choisi ce village comme point de chute ? hé bien non ce n'est pas pour compléter l'arbre généalogique de Dominique, rien à voir, c'est simplement le fils d'un copain cyclo de Mamers qui habite là. Raphaël, avec son ami, a fait construire une charmante maison en bois ; si l'apéritif est pris sur la terrasse, la nuit trop noire nous empêche de profiter de la vue sur la campagne, et pour la piscine, la soirée est trop fraîche. C'est à l'intérieur que nous apprécions les pâtes, relevées avec de crème fraîche; l'heure de retard, plus la causerie, plus le repas, plus la douche et c'est encore demain.

     

    Malgré ce coucher tardif ou matinal le départ réel est à 5 heures, les deux garçons se sont réveillés pour nous saluer et nous souhaiter une bonne fin de parcours. L'humeur est excellente, finir la deuxième Diagonale !... le temps plutôt humide, la température pas très élevée, quand au dénivelé de ses 150 kilomètres pas la peine d'en parler, 500 mètres tout au plus. Nous sortons de ce paisible village par la rue Neuve, puis franchissons la Comtoise ou A 36, ensuite la plaine sur des routes calmes et le plus souvent sur des voies parallèles aux départementales, sans doute conçues pour les véhicules agricoles. Je traverse Cernay sans reconnaître une rue ou un lieu ; l'agréable semaine Fédérale que nous y avions vécu est déjà loin, 2004. Ensuite vraiment rien de bien passionnant à voir si ce n'est la cité Vauban à Neuf-Brisach, impressionnant ces remparts et ces fossés en tous sens. Si vous ne connaissez pas prenez le temps de voir la vue satellite de notre parcours sur le site Openrunner code d'accès : 2493740( au km 57).

    Le seul pointage du jour est effectué à la poste de Marckolsheim, dans le Bas Rhin, couplé avec le petit déjeuner, bien évidemment dans un autre lieu. Et c'est en repartant de cette ville que nous apercevons pour la première fois une ''équipe' « maillots noir et blanc », sur le terrain de sport ; entraînement ou petit déjeuner ? C'étaient des cigognes.

    Nous longeons maintenant l'ancien canal du Rhône au Rhin qui nous servira de guide jusque dans la ville de Strasbourg distante encore de 35 kilomètres. Nous roulons tantôt à gauche, tantôt à droite de ce canal ce qui oblige parfois à des ascensions très courtes mais pentues pour franchir des ponts routiers. Ce qui m'occasionne une chute de débutant ; oubli de décaler et vitesse réduite ne font pas bon ménage. Chute heureusement sans gravité et du bon côté, sinon le bain était imparable.

    Nous croisons deux cyclos qui partent, aux vues des plaques de cadres, pour une Diagonale ; nous appendrons par la Sariste Jocelyne Hinzelin que Frédérique et Alain tentent Strasbourg Hendaye, 1170 kilomètres en 99 heures maximum.

    Je vous dois quelques explications sur le terme de Sariste. A l'origine le terme Sariste désignait une personne, Diagonaliste elle même, qui surveillait le passage des candidats aux brevets sur les itinéraires déclarés, un pointage secret en quelque sorte. Le Sariste habite sur les axes des Diagonales ou dans les villes de départ et d'arrivée, il est prévenu des passages dans son secteur géographique ce qui lui permet d'accompagner sur quelques kilomètres ou de guider dans les traversées de villes.

    L'habitat se fait de plus en plus dense et nous sommes complètement dans la ville lorsque nous abandonnons le canal pour le Boulevard de Strasbourg, encore 6 ou 7 kilomètres de ville et à 11heures 35 le Fonctionnaire de service valide ma deuxième Diagonale.

     

    Et de Deux

     

    En sortant du commissariat nous faisons la connaissance de Jocelyne, elle avait été prévenue de notre arrivée par les deux gars que nous avions croisés le long du canal. Après quelques amabilités d'usages et les photos obligatoires en de telles circonstances Jocelyne nous propose son aide pour sortir de Strasbourg ; car il reste 30 kilomètres pour rejoindre notre ''nid'' sur l'arbre généalogique de Dominique.

    Pas le temps de faire du tourisme avec Jocelyne, elle doit avoir une casserole sur le feu ! Dans les carrefours elle passe, le deuxième cyclo ça va encore, mais le troisième c'est quelquefois scabreux et orange bien avancé. Ouf !... la bise et merci nous sommes dans la bonne direction.

    Nous arrivons sans problème chez Mylène, la fille de Dominique ; l’accueil parfait, et nous reprenons une vie plus sociale : journal, infos, fermer la porte pour ne pas laisser sortir le chat, etc....

    Ce rendez vous qui fait de moi un grand malade à 15 heures 30 .

    Pressentant une grande fatigue pour nos corps d'athlètes, Dominique avait programmé une visite chez le Kiné local, me voilà donc allongé sur la table de massage avec dans dans un premier temps des lampes pour chauffer les muscles, très agréable ; ensuite j'ai l'impression que ce Docteur cherche à faire des nœuds avec mes membres, diagnostics : manque de souplesse ; peut être pas très surprenant après 2000 kilomètres. Les soins se poursuivent, je suis sur le dos, ses mains glissent sur mon torse puis s'attardent sur le ventre, le malaxent, le triturent et la question qui fuse :  « quelle est votre groupe sanguin ? »

    Je ne sais pas si j'ai bien répondu à cette demande, toujours est-il que le second diagnostic de l'après midi tombe ; « votre vésicule biliaire ne fonctionne pas bien ». Que faire pour remédier à cela ? « Plus de viande rouge et éviter les laitages, vous pouvez aussi vous aider avec le livre: 4 groupes sanguins, 4 régimes ». Régime pas simple à tenir pour moi, je verrais donc cela plus tard, je me rhabille ; ce Kiné souhaitant un règlement en espèces je file au distributeur bancaire le plus proche  pour revenir payer la consultation ; bizarre, vous avez dit bizarre. Ensuite retour chez Mylène, repos, discussions diverses et question je repars pour la troisième ou pas ?

    Physiquement je me sens pas trop mal, mais le découpage des étapes m’inquiéte, 640 km sur les deux premiers jours avec un départ de Brumath à 2 heures du matin le 26 juin ! .... Nous profitons de l'excellent dîner pour étudier une modification éventuelle du découpage des deux premiers jours. Nous optons assez vite pour faire les 30 kilomètres de Brumath à Strasbourg en train, un départ réel de Strasbourg à 20 heures le 25 juin avec comme objectif de parcourir une centaine de kilomètres, suivi d'une nuit de 5 heures  Le 26 cela fera 260 et le 27 dans les 250 kilomètres ; il ne reste plus qu'à obtenir l'accord du responsable des Diagonales et à rechercher deux nouveaux hôtels. Obtenir l’autorisation d'avancer le départ est simple comme un coup de fil, trouver deux hôtels plus difficile et principalement pour le deuxième. Des travaux de maintenance dans la centrale nucléaire de Nogent sur Seine font que tous les hébergements sont complets à 30 kilomètres à la ronde et pour deux ans. Nous trouvons « Morphée » dans le Formule 1 de Provins mais avec deux fois 10 kilomètres en prime.

    La dernière nuit en terre Alsacienne est longue, mais malgré la fatigue et le manque de sommeil accumulée depuis Brest je me réveille plusieurs fois avec des sensations curieuses de chaleur dans les genoux ce qui n'est pas très rassurant pour les 4 jours à venir, car j'ai bien envie de relever le défi de Dominique qui est de retourner à Brest en vélo. Nous occupons notre matinée à refaire nos sacoches et des courses pour le déjeuner ; je profite de cette sortie en ville pour me rendre chez la fleuriste. Mylène aura la surprise, en rentrant du travail, de découvrir un bouquet, que je trouve joli dans un vase ''Evian''.

    Le poulet, acheté à la rôtisserie, avait certainement fait moins de kilomètres que nous ; pâtes, fromages et yaourt compléteront le repas. Après la longue sieste, nous renfilons la tenue de « combat », une caresse au chat toujours condamné à rester à l'intérieur de l'appartement et partons vers la gare. Il y a beaucoup de cyclistes dans ce TER mais chacun trouve une place ; vers 18 heures le soleil a laissé la place à des nuages bas sur Strasbourg, la température est du même niveau, cela ne promet rien de bon pour la suite. Premiers clients d'un restaurant, premiers sortis, leçon bien apprise ! ce qui nous laisse de la marge pour nous rendre au Commissariat où nous rencontrons Bernard Faitrop notre second Sariste Strasbourgeois.

     

    Acte III, Strasbourg - Brest

    A 19h 50, carnet de route tamponné nous nous élançons dans notre troisième tentative de Diagonale, celle que j'avais baptisé «l'Improbable», tant le projet me paraissait dantesque, ok, le terme est peut être trop ronflant, mais il me plaît bien. Bernard, connaît bien sa ville et l'échauffement oublié, nous nous retrouvons rapidement en campagne et tout aussi rapidement une pluie dense nous arrive dessus, j'espère que notre guide a eu le temps de rentrer chez lui. Nous nous abritons dans une cabine téléphonique de Mutzig pour remplir la carte postale de départ et repartons sans attendre la fin de l'averse qui se prolongera une petite heure. Devant nous le relief et les nuages se confondent avec cette grisaille ce qui ne nous surprend pas, puisque nous approchons du Col du Hantz, 640 mètres et 7 kilomètres d’ascensions. La nuit est maintenant bien installée, quand le sommet est franchi, nous empêchant d'apercevoir la stèle à la mémoire du millier d'hommes de la vallée qui ont été déportés en 1944. La descente est plus longue que la montée, ce qui en général n'est pas pour me déplaire, mais ce soir là je suis frigorifié et c'est tout tremblant que j'arrive à Senones pour le premier pointage à 23 h40. Pas de commerces donc pas le réconfort d'une boisson chaude, une carte postale dans la boite jaune et direction l'hôtel à Raon l’Étape encore distant de 12 km, Pourvu que le code fourni hier, lors de la réservation en ligne fonctionne, sinon dodo sous un porche, voilà l'inquiétude que nous avons ; heureusement la porte s'ouvre et au bout du couloir les clés nous attendent, posées dans une soucoupe, accompagnées d'un petit mot : « chambre au 1er, bonne nuit » . Trois portes à passer, vélos sur l'épaule, nous pénétrons dans une chambre, que dis-je une suite, de quoi accueillir dix cyclos, deux dans le lit et huit sur l'épaisse moquette bleue.

     

    Cinq heures nouveau cyclo-cross, mais cette fois pour descendre, pas un spectateur sur la ligne de départ, qu'importe nous repartons d'un bon coup de pédales vers la célèbre cité de Baccarat, j'ai bien pensé rapporter un lustre en cristal en souvenir, mais les boutiques ne sont pas encore ouvertes, une prochaine fois peut être. La pluie ce matin, a fait place à un brouillard pas assez épais pour nous mettre en danger, mais suffisant pour nous masquer sans doute de superbes vues, ce sont les changements de vitesse incessants qui me laissent penser cela. Le café pris à Bayon, Meurthe et Moselle, était sans doute trop fort pour Dominique, nous avons bien parcourus deux kilomètres quand je m'aperçois qu'il lui manque quelque chose et lui demande de se gratter la tête. Son casque est resté sur la table du petit déjeuner ; repos pour moi, aller retour pour lui. Le soleil nous chauffe bien et nous cheminons tranquillement ou presque, une crevaison de plus pour moi 3 à 2 à mon avantage et puis nous avons un autre petit souci. Si pour le GPS, nos modifications d'étape ne changent rien, ce n'est pas la même chose pour mes feuilles de route, elles ne correspondent plus aux nouveaux découpages des étapes, ce qui m'oblige à de savants calculs pour savoir si nous sommes dans les temps ; cette gymnastique a un côté bénéfique elle m'occupe l'esprit. Nous effectuons notre pose déjeuner à Gondrecourt le Château, un très bon choix ; un air de vacances, avec ce repas pris sur la terrasse qui surplombe la rivière l'Ornain où j'aperçois deux truites.

    Nous pédalons maintenant en Haute Marne et notamment à Chevillon pour un unième pointage, cette ville est curieuse, encaissée et toute en longueur, bordée de sites industriels abandonnés, vestiges d'une époque où la métallurgie régnait dans la région, seule subsiste une activité dans de grands hangars crème et bleu au nom d' Arcélor Mittal. Ne trouvant pas de commerces dans la rue principale, nous retournons sur nos pas, puis à droite ou j'ai aperçu en passant tout à l'heure, l'indication Médiathèque. Peut être sera t-elle ouverte en ce mercredi après midi.

    Le château qui l'abrite est entouré d'un magnifique jardin médiéval ; l'intégration de cette bibliothèque dans ce vieux bâtiment est une réussite ; toutefois j'ai un regret en quittant ce lieu historique : le tampon encreur a remplacé le cachet de cire, mon carnet de route aurait bien aimé !. La Marne ne nous arrête pas, pas plus que la côte qui se présente pour quitter sa vallée ; ensuite nous empruntons les routes de l'Aube ; c'est vraiment bien une Diagonale pour revoir ses départements !. Nous traversons Arcis Sur Aube, où nous devions initialement passer la nuit, à 19 heures ; encore 70 kilomètres pour rejoindre Provins. Vallée de la Seine oblige les routes sont plates tout comme les champs situés de chaque côté, des traces d’inondations subsistent, les cultures ont soufferts. Le coup de pédale n'est plus très productif, estomac vide, idem pour les sacoches, pas de commerce, je fonctionne à la barre énergétique. Les militaires que nous croisons semblent partis eux aussi pour une longue galère, mais en courant ; le chef prudent, a placé une ambulance derrière le groupe. Provins, ville haute, se voit de loin, ce qui n'est pas toujours bon pour le moral, la cité brille de tous ses feux pour notre arrivée, mais je ne suis pas d'humeur à apprécier ces illuminations. Je cherche des yeux l'enseigne qui me redonnera le moral, Dominique m'indique un M jaune sur un fond vert, je préfère ne pas voir et poursuivre ma route. Une pizzeria se présente, ce qui fait l'affaire vu l'heure. Heureusement qu'il y a du foot sur son grand écran plat sinon le rideau était baissé nous annonce le patron; nous dégustons notre pizza et notre coca en regardant des images de la seconde mi temps de Brésil – Uruguay dans la demi finale de la coupe des Confédérations,1 à 1 quand nous sortons ; Armel me donnera le score à mon retour ; maintenant il faut trouver le 4 étoiles. Nous abordons un groupe de jeunes, genre casquettes de travers, leurs premiers commentaires : ' « pas facile t'expliquer »!  puis « tu m'suis » et là un gars monte dans une voiture et nous devons appuyer fort pour ne pas le perdre de vue ; arrêt le long de la voie ferrée «tu traverses les voies, j'fais le tour» plus d'images de la voiture, que le son des pneus ; l'équipage réapparaît, de nouveau poursuite, quelques rond points et le Formule1 est devant nous. Un grand merci à ce guide efficace, sans doute surnommé Prost par ses potes ; vélos dans un cabanon de l'hôtel, douche et au lit.

     

    Ce matin Dominique est heureux, il sera dans son pays de Mamers en fin de journée, mais il y a de l'ouvrage pour rejoindre la Sarthe. Si le dénivelé ne demande guère d'efforts, la pluie dès le départ et ensuite le vent sont plus embêtants. Le premier pointage à 7 heures se fait« Aux Belles Miches » de Donnemarie Dontilly, pas de commentaires je ne croise que le patron, Monsieur Lequeux. Nous sentons déjà l'approche de la Région Parisienne, les routes que nous croisons supportent un fort trafic, Fontainebleau se traverse sans souci de même que sa forêt qui nous abrite du vent, la pluie a disparu depuis quelques temps . A Milly la Forêt, un bref regard sur les Halles du XV siècle, superbe bâtiment en bois couvert de tuiles plates , vous m'excuserez si je ne m'arrête pas pour prendre les horaires du marché ? Je passe maintenant devant un alambic, posé dans les jardins du Conservatoire National des Plantes à Parfums Médicinales et Aromatiques, ce lieu doit être connu a Chemillé . Le tourisme approfondi de la ville en reste là, il faut nous rendre à Étampes pour le dernier pointage de la région Parisienne et le commerce choisi est la supérette Dia, à 11heures. Dix minutes de pose nous suffisent pour : pointer, avaler une salade, remettre une couche de pommade sur des fesses douloureuses et refaire le niveau des bidons. Rassurez vous je me suis lavé les mains entre les deux dernières opérations !

    L'Essonne cède la place à l'Eure et Loir ; né à Le Lude, ce nom Loir me rappelle mes racines, mais je n'ai pas le temps de rêvasser bien longtemps, la plaine que nous traversons en direction de Chartres est bien ventée défavorablement, vent qui restera plus ou moins présent, autant le dire maintenant jusqu'à Brest. Ce n'est pas la tempête non plus, mais cela rajoute une dépense d'énergie que nous n'avons plus trop en magasin. Je me dois de signaler une bonne adresse  pour déjeuner : chez Yann traiteur à Béville le Comte ; dans la formule à 13 euros 10, il ne manque que la sieste.

    Une phrase sur Chartres : « pistes cyclables lamentables ». Notre arrivée à La Loupe marque la fin de la plaine et les premières collines du Perche, le GPS devient inutile, mon compère est presque chez lui, plus que 55 kilomètres à parcourir pour aujourd’hui. Nous terminons l'étape avec le renfort d'Hubert, licencié au Vélos Loisirs Saônois, le club de Dominique ; Hubert n'est autre que le Papa de Raphaël, vous vous souvenez, à Bretten ? Hubert est aussi le Beau Père d'Omar Sy, mais cela est une autre histoire. A 20 heures 10 les vélos sont dans le garage ; jamais terminé une étape complète aussi tôt ! Évidemment la soirée est plus familiale qu'à l'accoutumée, Dominique étant chez lui, mais nous ne prolongeons pas outre mesure ; la prochaine journée s'annonçant encore bien chargée nous montons nous coucher, ce soir chacun aura sa chambre, je suis seul.

     

    Pour cette avant dernière journée, on part cette fois avec un vrai petit déjeuner dans le ventre, merci Nelly ; nous traversons Mamers pas encore réveillé. Le ciel est gris, les côtes se succèdent, où le plaisir de rouler dans le perche !... Je reconnais la pelouse à Saint Rémy du Val ou j'ai fait une petite sieste lors de mon deuxième Paris Brest Paris Randonneurs, Dominique m'apprend alors que ce sont les parents de Martine, cyclote Mamersoise chevronnée qui habitent ce lieu. Nous atteignons Vilaines La Juhel sous la pluie il est 7 h 50, j'espère bien revenir dans cette ville en 2015 pour un nouveau P.B.P., puis Fougères, autre ville étape de P.B.P. Ce n'est pas très fréquent, nous rentrons au restaurant Le Glacier de la place Gambetta, avec de l’avance. Pas très réchauffé et mouillé j'ai plus envie d'une soupe que d'une assiette de crudités en entrée mais rien dans ce sens ne figure sur la carte, dommage. L'après midi est plus sec mais le vent nous gêne toujours dans notre progression ; la Bretagne aime le cyclisme, cela se remarque dans le comportement des automobilistes qui nous encouragent par de petits coups d'avertisseurs, attentions plaisantes. 70 kilomètres depuis ce midi, nous approchons de Dinan, ici aussi je suis passé à deux reprises avec le Paris Brest Paris, mais en formule Audax, retour peut être en 2016?

    A Lavallay, des préparatifs sonores laissent présager à une manifestation pour des sportifs ne pratiquant certainement pas l'Audax, cela ressemble fort à un critérium Cycliste. Puis descente vers le viaduc qui enjambe La Rance, derniers instants « zen » pour Dominique.

    Au bout du viaduc deux options de parcours se présentent pour rentrer dans la ville fortifiée de Dinan : à gauche la rue du Général de Gaulle voie roulante à la pente régulière, à droite la rue Michel, pavés irréguliers, chaussée bombée et étroite. Le GPS choisit cette dernière, secoué je monte difficilement, entre les voitures et les piétons, en haut plusieurs directions possibles, je m'arrête, Dominique n'étant pas dernière moi. Il arrive en grimaçant et m'annonce « j'ai mal à la cuisse », depuis longtemps ? « Non à l'instant sur les pavés ». Nous ne faisons pas plus de cas de l'incident, sur des grandes distances il y a toujours des douleurs qui apparaissent sans trop savoir pourquoi et qui le plus souvent disparaissent comme par enchantement. Nous poursuivons donc vers Lamballe, le fief d'un club cyclo au maillot blanc zébré de bandes rouges et toujours présent en nombre dans les grands événements. Pendant la pause dîner Dominique absorbe des cachets et se masse longuement la cuisse douloureuse ; cet instant de détente est marqué par la visite de Josiane Lesne, la Sariste locale, qui à repéré nos plaques de cadres sur les vélos. Petites discussions entres cyclos au long cours, photos et conseils pour sortir de la ville ; je repars avec un message d'amitié à transmettre à Nicole et Jean Claude Chabirand du RC Anjou. L'hôtel, Le Triskell à Plouagat où nous devons passer la nuit est distant que de quarante kilomètres, en temps normal deux petites heures suffiraient, mais ce soir, il faut ajouter le vent et surtout la cuisse blessée de Dominique. Comment passera t-il les «bosses» de plus en plus nombreuses ? Et la célèbre côte d'Iffiniac ?. A la vitesse ou nous roulons, si l'enfant du pays est sur le pas de sa porte nul doute qu'il aura le temps de nous reconnaître !... Je crois que j' inverse les rôles, Bernard Hinault ne doit pas nous connaître ? Finalement nous passons toutes les difficultés au rythme accepté par la cuisse endolorie, c'est à dire pas très vite. Résultat 1h30 de retard quand nous débouchons sur ce grand parking, vide de tout camion à une exception près. La restauration est fermée depuis longtemps, mais la serveuse abandonne son balais pour nous servir deux assiettes de charcuteries mises de coté à notre intention, fatigue et inquiétude font que la cochonnaille passe difficilement. L'unique chauffeur présent dans ce relais routier engage la conversation, celui qui fait également de la grande distance mais par obligation est quelque peu surpris de nos trajets, lui qui le lendemain matin partira dans son 40 tonnes pour Strasbourg. Le regard sur les prévisions météo désagréables pour les 24 prochaines heures n'empêchent pas le sommeil. En ce qui me concerne je commence à croire à la réussite de ce défi. Que se passe t'il dans la tête de Dominique ?.

     

    Pour l'ultime étape il reste à parcourir cent trente kilomètres avant la montée des marches du commissariat de Brest à 11 heures 50 au plus tard, facile me direz vous avec un départ à 4 h 30 .

    Le doute sur l'état de santé de mon compagnon s'étant installé, il souhaite avancer le départ à 2 heures 30 ; seulement 3 heures de sommeil pour cette dernière nuit passée avec mon copain, il faudra que je calcule, cet hiver, le coût de revient d'une heure de sommeil sur trois Diagonales cumulées !.

    Nos efficaces dynamos «SON» reprennent du service, bourrasques de vent et pluies sont nos compagnons de routes et de suite Dominique est à la peine, mieux vaut ne pas allumer nos lampes frontales pour regarder notre vitesse, une chose est sûre Guingamp est quand même traversée En Avant, jeu de mots pour les «footeux» !...

    Nous ne respectons pas les panneaux d'interdictions placés en pleine campagne sur notre route, pas le moment de rallonger les festivités. D'ailleurs la fête est terminée quand nous traversons le village de Louargat ou de Plounérin, je ne sais plus ; nous nous faufilons parmi les stands vides et les barrières, les rues sont multicolores de confettis détrempés, nous aussi, mais en jaune fluo !

    Ce qui devait arriver se produit vers Plouigneau, Dominique met pied à terre à 6 heures, il n'y arrive plus. Il décide de se reposer quelques minutes pour tenter de poursuivre plus tard, à son rythme, ne voulant pas compromettre ma Diagonale, l'attendre ne servirait à rien si ce n'est qu'à nous faire arriver sans doute hors délais tous les deux. Ce n'est pas très glorieux et j'avoue avec le recul que je n'ai pas insisté beaucoup pour qu'il essaie encore de me suivre, je repars seul. Au bout de 4 ou 5 kilomètres, en haut d'une côte, un abri bus m'abrite pour une petite pose de barres énergétiques, je regarde derrière moi espérant secrètement, mais aussi résigné, le voir arriver, mais en vain. Il faut me résoudre à tenter de finir seul et avec une difficulté supplémentaire : je n'ai pas de cartes et le GPS est resté, ce qui est normal, sur le guidon de son propriétaire.

    Je rentre dans Morlaix, cette ville je la connais bien, j'ai suivi une formation de six mois pour ma formation d'électricien auto en 1972. Trajet en Renault 6, Morlaix La Flèche Morlaix pratiquement tous les week end pour rentrer jouer au foot dans la division la plus basse du Maine et Loire. Si ce n'est pas être mordu !… Morlaix c'est aussi le souvenir d'applaudissements quand nous traversons la ville et passons sous son élégant viaduc, escortés par les six motos sécurités du Paris Brest Paris Audax. Pour l'instant présent je suis à la recherche d'une Boulangerie Pâtisserie pour assouvir mon envie de flan, mon dernier pointage intermédiaire à 6 h 30 çà ce fête.

    Hélas elles n'ouvrent qu'à 7 heures, le dessert convoité se dégustera dans une autre ville et c'est un fleuriste qui décharge son camion en ce samedi matin de marché qui a l'honneur de valider mon passage en terre Morlaisienne.

    Je sors de la ville quand mon téléphone sonne, l'écran affiche Dominique, que se passe t-il ?. Mon infortuné compagnon m'apprend qu'il a définitivement abandonné et qu'il se trouve à quelques centaines de mètres de moi, puisqu'un automobiliste a bien voulu le prendre avec son vélo pour le déposer à la Gare de Morlaix. Triste si proche du but.

    J'ai quelques difficultés pour trouver la route de Landerneau, je me retrouve dans une grande courbe qui se trouve être un accès à la voie rapide, demi tour, donc sens interdit, coup de klaxon réprobateur d'un camionneur, mais, tout rentre rapidement dans l'ordre. A Landerneau je confie ma dernière carte postale à la poste, maintenant vous connaissez les procédures. Trente kilomètres, j'ai une bonne marge au niveau de l'horaire, mais aussi de l'inquiétude ; un incident mécanique, une chute, j'ai vraiment hâte de terminer. Les panneaux directionnels marqués Brest se succèdent ; en voyant les automobilistes qui me croisent ou qui me doublent j'ai une drôle de sensation, le sentiment qu'ils savent ce que je viens d'effectuer, cette euphorie est sans doute due à l’absorption des derniers tubes énergétiques.

    Là, sur cette ligne droite, rue de Paris, il est là le panneau tant attendu, devant moi : BREST, mais ce n'est pas terminé, il me faut retrouver le commissariat. Je me doute être sur la bonne direction mais préfère demander confirmation à un piéton, je longe la voie ferrée, la gare se présente à ma gauche, remonte à droite, à gauche, un rond point et c'est fait . J'ai atteint mon GRAAL, il y a aussi les applaudissements de Dominique ce qui est à la fois agréable et triste. Dominique m'accompagne à l'intérieur, le planton appose son cachet humide rouge et note 10 h 37. Pas un mot du fonctionnaire sans doute préoccupé par un événement beaucoup plus important que l'arrivée d'un cyclotouriste, même venu de loin.

     

    Le débutant venait d'aligner Trois Diagonales de suite, un Triangle

     

    Le téléphone reprend du service, les messages de félicitations se succèdent pendant que nous papotons dans un bar proche de la gare, un dernier repas en commun, puis à 13 h33, nous montons dans le train. Les tenues cyclistes laissent la place aux vêtements civils ; sans douche je me demande si je n'incommode pas mes voisins de wagon. Dominique s'assoupit rapidement, moi pas.

     

    17 heures 23 Nelly est sur le quai de la gare du Mans, je remercie une nouvelle fois Dominique de m'avoir permis de découvrir les Diagonales, avant de monter dans le TER à destination d'Angers St Laud, 18 heures 42 quai A, je retrouve Ginette, heureuse de me voir revenir entier, pour effectuer en sa compagnie et en voiture le dernier tronçon de cette belle aventure.

     

    C'est fini, il ne me reste plus qu'à sortir de ma bulle et à savourer ces 3200 km

     

    Brest / Perpignan, Perpignan / Strasbourg et Strasbourg / Brest

     

    A celles et ceux qui m'ont soutenus par des messages ou par des pensées, Merci, vous avez bien contribué à la réussite de mes trois premières Diagonales.

     

    Aux cyclotes et cyclos tentés par ce genre de brevets, foncez, le temps passe si vite ; vous ne le regretterez pas.

    Jean Luc

  • 8 juin 2013      

    Agos Vidalos

    HAUTES PYRENEES, DU 8 AU 14 JUIN 2013
    CAMPING DU PIBESTE

    Noué étions 26 licenciés : 19 cyclos et 7 marcheurs.

    Dimanche matin, nous avons commencé la semaine ensemble, grâce à Luc, le gérant du camping qui nous a fait visiter le village et la campagne environnante.

    Ensuite, chaque participant s’est adonné à son sport favori.

    Bien que le Tourmalet n’ait pas pu être monté à cause de la neige encore présente et l’Aubisque à cause de travaux, la semaine fut bien occupée.

    Les cols suivants : Tramassel via Hautacam, le Soulor, Marie Blanque dont la descente par le plateau de Bénou fut une merveille de beauté avec les vaches et les chevaux gambadant en liberté, Aspin, Peyresourde, Hourquette d’Ancizan, et le col d’Azet, sans oublier le pont d’Espagne, Gavarnie (le col de Tentes pour quelques téméraires) et Luz Ardiden ont enchantés les cyclos.

    Les marcheurs ne furent pas en reste grâce aux visites et randonnées.

    Ils ont découvert quelques villages, Ossen, Ségus, Omex, Viger.

    En partant du pont d’Espagne, ils ont randonné vers la Fruitière ou le lac de Gaube.

    A Gavarnie, ils sont partis à la découverte du cirque.

    Depuis le col de Tramassel, ils ont marché vers le lac d’Isaby.

    Quelques uns sont allés sur le mont Pibeste, observer les vautours.

    Belle semaine, température idéale pour pédaler ou marcher.

    Paysages très verts, flore abondante.

    Nous vous recommandons le camping Soleil du Pibeste.

    Belles randonnées vélo ou pédestre aux alentours.

    Accueil chaleureux, repas copieux.

    Pour les groupes, emplacement pour les vélos.